samedi 26 janvier 2013

Les objets nous racontent


Pour en terminer avec les livres que l'on peut mettre en correspondance avec Un griot en Provence, voici aujourd'hui l'avant-propos de mon recueil Les objets nous racontent qui plonge lui aussi ses racines dans le territoire de l'enfance. J'ai déjà eu l'occasion de l'évoquer lorsque j'ai présenté Les étincelles du temps de Pablo Barros. En effet les deux titres ont été édités dans la même collection par Cécile Odartchenko.


Par strates les objets se déposent dans la mémoire. Ils sont les sédiments de notre histoire.

Ouvrir des fouilles dans les souvenirs, y remonter à la lumière quelques formes oubliées, les confronter à d'autres du  présent, c'est créer une étincelle à même de crépiter dans le cœur, les sens et la pensée.

Grâce aux objets légués par mes grands-parents, mais aussi mes grands-oncles et grands-tantes, je  retrouve une époque à jamais abolie. Passant de l'un à l'autre je reconstruis le décor où je les ai connus. Revivent alors leurs visages, s'animent leurs regards et leurs voix me reviennent pour redire ces mots dont mon enfance ne mesurait pas toute la portée. Je peux lire aujourd'hui dans les registres du temps les lignes de leur destin, déjà tracées lorsque je suis venu au monde. Je peux comprendre la nature des liens qu'ils entretenaient avec leurs enfants.

Les objets que mes parents utilisaient dans mon jeune âge, contenaient en germe les promesses d'une vie nouvelle. Dans leur texture sont enfermés leurs espoirs et leurs craintes, que j'enregistrais moi aussi dans les fibres de mon être. Maintenant que je suis plus vieux qu'ils ne l'étaient à cette période, je peux expliquer ce qui dans mes actes a été par la suite rupture ou continuité.

Qui de l'enfance ou des objets aura le dernier mot ? En ce matin de la vie, un parfum d'éternité  entoure encore nos gestes, si bien que la forme et la matière se plient à notre soif de découverte et de merveilleux. Ce n'est pas une expérience neutre que de faire revivre en soi l'enfant que nous avons été, c'est aussi se mettre en surplomb des chemins que nous lui avons fait prendre.

Sont inscrits dans les objets de mes enfants les assauts d'une société où la marchandise est devenue reine. Sont inscrits aussi leur révolte et des forces qui m'avaient traversé avant eux, et avant moi les générations plus anciennes. Aussi les fils enchevêtrés qu'ils nous livrent demandent à être démêlés un à un pour  bien en saisir  la substance. Quelle part attribuer au relatif d'une civilisation ? Quelle autre à l'universel désir des vivants ?

Ma seule certitude est d'être fait de ces objets qui sont les gardiens de ma demeure. 


Complément : 
- Le site de l'éditeur. 
                       
 

samedi 19 janvier 2013

A la Goutte d'Or - Paris 18ème

Pour compléter la chronique précédente, voici également un livre dont Laure Dino a fait mention dans son compte-rendu de lecture de Un griot en Provence. Il a été écrit après les entretiens avec Serge Bec et Bernard Manciet et s'en est nourri.  Il s'agissait, comme pour les Landes de Gascogne, de donner à un territoire abandonné, mais cette fois urbain, une dimension épique et légendaire. Voici comment l'ouvrage a été présenté à sa sortie en 1997 :


Que ce soit avec l'Assommoir, le roman d’Émile Zola auquel il a servi de cadre ou bien avec l'occupation par les "sans-papiers" de l'église Saint-Bernard, durant l'été 1996, la Goutte d'Or se retrouve au 19ème comme au 20ème siècle, au coeur des questions les plus sensibles de son époque.

Quel est donc ce territoire de Paris, qui abrite aujourd'hui plus de cinquante nationalités, et auquel s'attache depuis des lustres, une image qui repousse autant qu'elle fascine ?

C'est ce qu'a voulu savoir le poète et éditeur, Jean-Luc Pouliquen, venu de Provence, animer de septembre 1993 à juillet 1994, des ateliers d'écriture dans une école du quartier.

Le travail qu'il a mené avec des enfants, aussi attachants que surprenants, par ce qu'ils ont su exprimer, lui a servi de fil conducteur pour rédiger ces chroniques.

Après avoir exploré l'histoire et la configuration des lieux, elles nous conduisent, à travers rencontres, observations, réflexions, participations aux événements qui rythment l'année, dans le présent de la Goutte d'Or.

Et, surprise, ce qu'elles décrivent bouleverse les idées reçues, pour nous faire entrer dans un terroir urbain que l'on devient avide de connaître à son tour.

Compléments :
- Il me reste encore quelques exemplaires vendus 15 € l'unité port compris. Contact : jeanlucpouliquen@hotmail.com
 - Lecture de Bagage, extrait du livre, par Anne-Claire Bertin sur le site L'Oreille Urbaine.


samedi 12 janvier 2013

Entre Gascogne et Provence

Au mois d'octobre dernier, dans sa présentation de mon récit Un griot en Provence, Laure Dino a fait mention de l'entretien que j'avais réalisé avec Serge Bec et Bernard Manciet, paru en 1994 et qui s'intitule Entre Gascogne et Provence. Il est devenu au fil du temps un témoignage précieux sur le parcours de ces deux grands poètes de langue d'Oc. Bernard Manciet nous a quitté en 2005, c'est la seule fois je crois qu'il s'est exprimé aussi longuement sur sa vie et sur son œuvre. Tout au long de l'échange j'avais essayé d'établir un mouvement de balancier entre Serge Bec le Provençal et Bernard Manciet le Gascon, afin que soit appréhendé l'espace littéraire occitan dans toute son amplitude. Voici comment fut présenté le livre à sa sortie :



Dans la littérature de langue d'oc contemporaine, Serge Bec et Bernard Manciet n'ont cessé de s'imposer par le souffle et l'universalité de leur poésie. Au moment où notre siècle s'achève, où les idéologies et les chimères se consument dans le feu de l'Histoire, il était opportun de faire avec eux l'inventaire d'une culture millénaire et de montrer quelles richesses ils ont su y puiser pour garder prise sur leur temps et faire entendre leur voix dans le grand concert de la création. C'est ce que leur a proposé Jean-Luc Pouliquen, animateur des Cahiers de Garlaban, qui interroge ici leur itinéraire depuis l'enfance jusqu'à la parution de leurs derniers écrits. Le Félibrige, l'Institut d'études occitanes, Mauriac, Giono, René Char, Oc, La Tour de Feu, les Cahiers du Sud, l'Allemagne en ruines de 1945, l'Algérie en guerre de 1958, l'Occitanie des années soixante, les troubadours, le XVIIème siècle baroque, le surréalisme, le golfe de Gascogne, le Luberon, l'Atlantique, la Méditerranée, Lubat, Métayer, Vincent de Paul, Bossuet, les Rouges du Midi... autant de repères qui jalonnent ces deux parcours en continuelle correspondance.
Mais loin de se refermer sur la Provence ou la Gascogne, Serge Bec et Bernard Manciet ouvrent une réflexion de longue portée sur les rapports que l'homme d'aujourd'hui tisse avec son avenir. Les entretiens sont suivis d'un large choix de textes de Serge Bec et de Bernard Manciet en version bilingue oc/français.

Compléments :
- Il me reste encore quelques exemplaires vendus 15 € l'unité port compris. Contact : jeanlucpouliquen@hotmail.com


samedi 5 janvier 2013

L'instant offert

Avec cette chronique s'ouvre la quatrième année de ce blog commencé en janvier 2010. C'est le moment d'adresser mes meilleurs vœux et mes remerciements à tous ceux qui le font vivre en m'envoyant leurs livres, leurs textes, leurs peintures, leurs dessins, leurs commentaires. Je n'oublie pas les membres qui me soutiennent et les lecteurs, de plus en plus nombreux qui viennent du monde entier. En trois ans, ce sont 166 chroniques qui ont été écrites à plusieurs mains, donnant ainsi plus qu'un point de vue personnel mais plutôt une approche partagée et collective de la poésie et de l'activité créatrice. Nous allons poursuivre dans ce sens en ces temps où le repli sur soi serait la pire des attitudes à adopter...



L’INSTANT OFFERT

Souffles humains
gonflant la voile de l’Histoire
quelle part est la vôtre
dans l’apaisement des flots.
A qui rendre grâce
de ce petit matin
tapissé d’étoiles
quand tout semblait éteint.

Jean-Luc Pouliquen