Des hauteurs de la Provence s'envolent pensées et créations d'aujourd'hui

samedi 4 janvier 2020

Avenimen d'un ribage / Avènement d'un rivage

Voici un titre qui convient parfaitement à ce début d'année, à ce moment où nous l'abordons comme une terre nouvelle qui va nous faire oublier la traversée tumultueuse des douze mois que nous laissons derrière nous.


Avec ce livre Jacques Guigou nous ramène à un rivage des origines, le sien, qui n'est pas si éloigné de celui de Paul Ricard que nous avons évoqué il y a peu. Jacques Guigou est en effet originaire de Vauvert dans le Gard, il a été professeur à l'Université de Montpellier et fréquente avec assiduité cette côte de sable, de dunes et d'étangs qui va de la Camargue à l'Hérault. Nous sommes en terre d'Oc porteuse d'une langue qui lui est chère. Aussi a-t-il souhaité que ce recueil déjà paru en français soit ici accompagné d'une traduction en provençal. La démarche n'est pas nouvelle pour lui. Déjà en 2011 ses Strophes aux Aresquiers avaient étaient traduites en occitan par Jean-Marie Petit, un poète qui est un familier de ce blog. C'est cette fois Jean-Claude Forest qui s'est chargé du passage d'une langue à l'autre. Nous avions déjà eu l'occasion de mettre en évidence son travail de traduction à propos du dernier recueil de Michel Miniussi dont il avait avec Philippe Gardy assuré la traduction de l'occitan au français. Pendant de nombreuses années les amoureux de la langue d'Oc se sont divisés à propos de la graphie à adopter pour la transcrire. Il y avait d'un côté les tenants de la graphie mistralienne, de l'autre ceux de la graphie occitane classique. Ces choix ont divisé et même écartelé certains poètes qui ne pouvaient se résoudre à adopter une graphie plutôt que l'autre. Ce fut le cas en particulier pour Serge Bec qui opta finalement pour une écriture dans les deux graphies. C'est cette option qu'a choisie Jacques Guigou qui présente une traduction de chaque poème dans les deux formes.
En français comme en provençal, c'est une même langue poétique qui nous est offerte, dense et resserrée. Elle glorifie ce rivage qui est pour le poète une source d'inspiration sans cesse renouvelée.

     Face aux rafales du vent de sable
     s'obstine
     la jeune pousse du tamaris
     motile
     elle s'éloigne de sa souche
     et pourtant ne la quiite pas
     dans les rafales du vent de sable
     l'instant dénoue
     ce que la durée avait lié
     après les rafales du vent de sable
     l'innocence du rivage

     Fàcia ai ventadas dau vent de sabla
     s'encanha
     lo joine brot de la tamarissa
     motile
     s'aluencha de sa soca
     e pasmens la quita pas
     dins lei ventadas dau vent de sabla
     l'instant desnosa
     çò que la durada aviá ligat
     après lei ventadas dau vent de sabla
     l'inonnocéncia dau ribatge

     Fàci i ventado dóu vènt de sablo
     s'encagno
     lou jouine brout de la tamarisso
     moutile
     s'aluencho de sa souco
     e pamens la quito pas
     dins li ventado dóu vènt de sablo
     l'istant desnouso
     ço que la durado avié liga
     après li dentado dóu vènt de sablo
     l'innoucènci dóu ribage

Complément :