samedi 22 février 2014

Couleurs en genèse - IV

Pour terminer notre série de rendez-vous avec Martine Lemoine, l'artiste nous propose aujourd'hui trois œuvres peintes à quatre mains avec Myrtil Scott. On se souvient du Journal à quatre mains écrit par Benoîte et Flora Groult qui avait réuni deux sœurs pour un même livre. J'ai demandé à Martine Lemoine et à Myrtil Scott ce qui les avait conduit à cette expérience en peinture.

Sans titre, technique mixte, 97 x 130 cm
  
Martine et Myrtil, par quels chemins avez-vous été amenées à peindre à quatre mains ?

Nous fréquentions le même cours collectif de peinture depuis des années. Myrtil s’est retrouvée en possession d’une importante quantité de pigments que ni l’une ni l’autre ne savions utiliser. L’idée de se retrouver pour étudier la question a germé pour fleurir en rencontres régulières à nos domiciles respectifs en partie transformés en « laboratoire » de recherche, d’essais, d’expérimentations. Nous en sommes venues à peindre à deux sur une même toile : peindre à 4 mains.

Sans titre, technique mixte, 97 x 130 cm

 Comment procédez-vous ?
 
Pour quatre mains participantes, c’est un jeu (dans le sens où comme des enfants nous prenons un temps pour nous amuser) avec un but, un challenge : Une toile « ABOUTIE ». Nous partons en règle générale sans a priori. C’est magnifique, nous avons le choix : taille de la toile, gammes de couleurs, acrylique, huile, glycéro, pigments, pastels, encres, brou de noix … Ensuite 1, 2, 3, ou 4 mains, sans les identifier car elles vont et viennent sur la toile quand elles le jugent bon ou nécessaire. A tour de rôle ou ensemble, chaque main apporte sur son propre travail ou sur celui de l’autre participante, ce qui est en son pouvoir pour tendre au but : une œuvre, techniquement parlant, « Aboutie ». Donc liberté d’intervention dans le cadre. Le lien qui unit le tout : Parole/Oreille/Œil. Nous communiquons, partageons, opposons nos avis, prenons en considération et en compte l’avis de l’autre. Nous nous laissons surprendre par les renaissances successives de la toile. Nous les acceptons ou les refusons.

Sans titre, technique mixte, 120 x 80cm

Qu'avez-vous retiré de cette expérience ?

Une leçon de vie : APPRENDRE : à donner, recevoir et à apprendre. Traduire par des actes posés l’acceptation, le respect  de «  l’Autre »  dans sa différence  d’être et de faire. Apprendre à « travailler » à plusieurs, à intégrer les interventions de chacune pour ne voir qu’Une œuvre. Apprendre l’humilité, à savoir qu’une personne à elle seule n’a pas la science infuse. Le savoir, l’expérience, l’intuition picturale de l’autre peuvent corriger, compléter, magnifier l’autre. Expérimenter que la mise en commun d’atouts différents peut produire une grande richesse. Vivre l’Humilité dans la déception du but manqué. Apprendre la persévérance dans l’effort et le travail de la recherche commune. Recevoir, encouragement de voir qu’il est possible à deux de fixer un même but et d’y parvenir par les apports de chacune. La joie de peindre ensemble, de mieux se connaitre.

Compléments :

samedi 15 février 2014

Couleurs en genèse - III

Pour ce troisième rendez-vous avec Martine Lemoine, nous présentons un triptyque où chacune des pièces sera montrée tout d'abord séparément puis réunie avec les deux autres. Par ce procédé nous nous attarderons sur sa manière de peindre afin de mieux comprendre l'essence même de son art. Afin de nous y aider, nous avons choisi quelques extraits d'un texte paru en 2009 intitulé Martine Lemoine, instinct et intelligence de l'abstraction écrit par le critique d'Art Antoine Antolini, responsable des Éditions des Musées et de la Culture.


"La peinture de Martine Lemoine va tout de suite à l'essentiel... Une gestualité, qui ne provient pas des écoles de l'action painting américain ni de l'informel européen mais émane d'une vie intérieure intense, qui, à travers ses toiles, trouve à s'exprimer picturalement."


"Le style de l'artiste est maîtrisé dans le registre de l'abstraction, c'est autant un style qu'une partie d'elle-même... Si on ressent une poésie, voire un lyrisme dans certaines de ses œuvres polychromes, colorées, le peintre nous en laisse le choix et construit en fait une démarche originale dans la "non-figuration".


"C'est à partir du coeur et non de la raison qu'elle peint, nous renvoie des messages enfouis et intemporels ; les facettes codées de ses univers non-dits, nous captive de suggestions".

Triptyque, Technique mixte, 100 x 150 cm, Collection privée

"L'artiste veut laisser au spectateur une entière liberté de voir, d'interpréter, afin que celui-ci projette dans le tableau un regard personnel, un vécu, sans contraintes et directivité de la part du peintre."

samedi 8 février 2014

Couleurs en genèse - II

Pour cette deuxième rencontre avec Martine Lemoine, nous allons partager ses recherches sur le rouge à travers six de ses œuvres qui seront complétées par les notes qu'elle a souhaité ajouter au bas de chacune d'entre elle. Le rouge est plus qu’une couleur, c’est une expérience à faire, une traversée à partir de ses différentes tonalités, du carmin au vermillon, et de ses alliances sombres ou lumineuses avec les bleus ou les jaunes. Le rouge nous parle, nous interroge. C’est du dedans de notre être que nous pouvons lui répondre.

Adam, Acrylique, 80 x 80 cm, Collection privée

Pour les Hébreux, le mot Adom est synonyme d'Adam, qui vient d'Adamus, fait de terre rouge (Dans le cadre de la création de Dieu).

Robur, Acrylique, 92 x 73 cm

Les Latins avaient plusieurs mots pour signifier la couleur rouge dont robur qui désigne le chêne dont le bois est veiné de rouge, appelé aussi rouvre. Robustus, dérivé de Robur, signifiait « de chêne », d'abord, puis, dans un deuxième temps, « robuste, fort, résistant, solide », comme le chêne. 

Carmine Esaïe 1.18, Acrylique, 92 x 73 cm

Le mot cramoisi « pigment rouge produit par un ver » correspond à une couleur rouge foncé éclatant, tirant sur le violet. À l'origine, il provient de la teinture obtenue des corps séchés d'un insecte, la cochenille du chêne kermès, d'où le nom de « kermésy », devenu « cramoisi ». C'est un mot apparenté au latin vermis (ver) qui a donné worm en anglais. Le latin médiéval carmesinus (et sa forme contractée carminus) a également pour dérivé carminium qui a donné carmin en français (Carmine en anglais). 

 "Venez et plaidons dit l’Éternel. Si vos péchés sont comme le cramoisi, Ils deviendront blancs comme la neige ; s’ils sont rouges comme l’écarlate, ils deviendront comme de la laine". Esaïe 1:18 

Présent, Acrylique, 92 x 73 cm

Le Présent qui désigne entre le passé qui n’est plus, 
et le futur ce qui n’est pas encore. 

Phoenix, Acrylique, 92 x 73 cm

En symbolique, il désigne le point cardinal Sud depuis la plus haute antiquité. Le rouge est ambivalent dans la symbolique occidentale : Les Grecs avaient plusieurs mots pour désigner la couleur rouge dont Phoenix désignant la culture du Sud de la Méditerranée. La régénérescence (le phénix), la chaleur accueillante, l'appétit, la vie, la force vitale. 

Grâce, Acrylique, 100 x 100 cm

samedi 1 février 2014

Couleurs en genèse

Nous continuons ce mois de février nos expositions virtuelles. La précédente était consacrée à Ghislaine Lejard. Nous accueillons aujourd'hui Martine Lemoine dont j'ai déjà eu l'occasion de parler à propos du livre pauvre que j'ai réalisé avec elle. L'artiste nous propose de commencer par des œuvres liées à sa fréquentation de la Bible qu'elle approche comme "la Parole de Dieu". "Je la lis donc et la médite en tant que telle" nous a-t-elle expliqué, en ajoutant "Lors d'une nième lecture de la genèse j'ai été interpellée par ces versets de la création et mes réflexions sont ressorties sur les toiles". Il y a peu j'ai parlé de Gaston Bachelard et me revient en tête son introduction à la Bible de Chagall. "Chagall lit la Bible, et, tout de suite, sa lecture est une lumière" écrivait le philosophe. Nous pouvons reprendre ses paroles à propos de Martine Lemoine. Voici donc ses tableaux en dessous desquels nous avons reproduit les versets qui l'ont inspirée :

Création Genèse 1.1, Techniques mixtes, 120 x 80 cm

Au commencement Dieu créa le ciel et la terre 
Genèse 1.1

Genèse 1.3-5, Acrylique, 116 x 80 cm, Collection privée





Dieu dit : Que la lumière soit !
Et la lumière fut.
Dieu vit que la lumière était bonne,

 et Dieu dépara la lumière d’avec les ténèbres.
Dieu appela la lumière jour et il appela les ténèbres nuit.

 Il y eut un soir et il y eut un matin : ce fut un jour.
Genèse 1.3-5

Séparation des eaux d'avec les eaux Genèse 1.6-8, Acrylique, 130 x 97 cm






DIEU dit : qu’il y ait une étendue entre les eaux pour séparer les eaux d’avec les eaux.
 Dieu fit donc cette étendue, sépara les eaux qui sont au-dessous
 de l’étendue d’avec les eaux qui sont au-dessus. Il en fut ainsi. 
Dieu appela l’étendue ciel. Il y eut un soir et il y eut un matin : ce fut le deuxième jour.
Genèse 1.6-8