samedi 4 décembre 2010

Le n° 5 de la revue Incognita

Si j'ai déjà parlé en début d'année de Luc Vidal, je n'avais pas encore eu l'occasion d'écrire sur sa revue Incognita dédiée à l'activité créatrice contemporaine. En résistance aux démons de notre époque, avec patience, obstination, et en complément de son activité d'éditeur, Luc Vidal affirme à travers cette publication un courant de l'expression d'aujourd'hui fondé sur la liberté, l'exigence et l'indépendance de l'esprit. Celle-ci s'inscrit dans une Histoire et se veut un prolongement actuel d'expériences plus anciennes où l'amitié, la générosité et l'ouverture étaient au rendez-vous. Je pense en particulier à ce qui s'est passé autour de L'École de Rochefort. Pour présenter ce dernier numéro d'Incognita qui vient de paraître et dont Roger Wallet est la tête d'affiche, j'en reproduis l'éditorial écrit par Luc Vidal lui-même.




« Si je vivais, je n’écrirais pas. » – JEAN SULIVAN

C’est par la chanson que la littérature est venue frapper à la porte de Roger Wallet. Son goût des autres et de l’humble posture face au monde est l’évidence même. Cette chanson française a fertilisé ses livres et même inspiré l’un des titres de son oeuvre : 33 Tours. Elle est la sauvegarde de tout. Regardez le film La Chanson de Saint-Max réalisé par Alain et Michel Le Thomas d’après les textes (1) de l’auteur et vous vous approcherez d’une certaine vérité. Une rencontre souhaitée avec son père qui n’a pas eu lieu est source d’une grande mélancolie dans l’écriture (et la vie) de Roger. Les paysages de Picardie semblent raconter un peu ses états d’âme. Cette chanson, pour lui est un art majeur qui rejoint aussi son amour pour l’art de la marionnette. L’écriture et le style de ses romans et nouvelles conjuguent rigueur et vigueur d’évocation. C’est l’art de l’ellipse et du court métrage que l’auteur sert avec bonheur. Au fond, ce qui préoccupe Roger c’est la recherche permanente de ce qui fabrique l’âme d’un peuple et d’une langue.
C’est pourquoi cet Incognita n°5 dresse le portrait d’un écrivain qui à chacun de ses pas et chacune de ses phrases sait engranger des réserves de joies et de printemps. Au fil de l’ouvrage Philippe Lacoche dit le Wallet multiple. Jean-Louis Rambour raconte sa poésie pleine de chair et ses talents d’observateur des balades littéraires. Philippe Crognier évoque son cœur comme celui d’un tambour. Ève Leleu-Galland fait son portrait d’automne. Jean-Pierre Cannet saisit l’homme de la fiction et des paysages. Dominique Cornet cite le pédagogue. Et l’auteur lui-même confirme ce goût des autres en présentant douze portraits d’écrivains picards qui sont bien sûr d’ici et d’ailleurs.
Pour les autres volets de cette revue, Guillaume Dando plonge dans l’esthétique de Paul Verlaine. Alain Besson lève sa phrase au camarade Lénine pour constater la tragédie communiste. Jean-Luc Pouliquen questionne Bruno Péquignot sur ce qu’est la véritable ouverture philosophique. Françoise Trémolières chante la beauté de l’amour. Jean-Charles Cozic et Daniel Garnier présentent la saga de la presse nantaise de 1757 à nos jours publiée en trois volumes aux éditions L’Atalante. Ève Roland livre un long poème dialogué pour inventer la femme. François Huglo écrit une belle lettre au poète Gaston Puel tandis que Julien Leydier argumente sur la poésie du cinéma d’animation, que Jean Foucault s’interroge sur la poésie de l’instantané et Tony Olivaud sur les mots écrire et vivre. Enfin Thierry Picquet présente le bestiaire de l’artiste peintre, « chasseur », « chaman », Hester Van Wijngaarden.
En lisant l’œuvre de Roger Wallet, j’ai pris conscience que les mots avaient des yeux et que nous devrions être attentifs à la leçon de leurs regards.

LUC VIDAL
(1). La Chanson de Saint-Max, « Une photo des années 50 », « Sous les tropiques ». Saint-Maximin : Histoires de vies.
Complément :

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