Alors que la période des vendanges est maintenant derrière nous, voici une publication à la gloire du vin, de la vigne, de la poésie et de l'art. Nicole et Georges Drano, dont j'ai déjà présenté l'activité exemplaire au service de la poésie, avaient fait les choses en grand pour la centième d'A la santé des poètes, le rendez-vous mensuel qu'ils organisent dans le cadre de leur association Humanisme et Culture. Au Domaine de la Plaine, à Frontignan, connu pour ses vins de Muscat, ils avaient convié le 10 juin 2010, poètes, photographes, musiciens et plasticiens, à venir faire partager leurs créations avec le public. L'essentiel de cette rencontre est aujourd'hui fixé sur le papier dans ce numéro spécial des Carnets des Lierles paru en avril dernier.
Celui-ci regroupe une présentation du Domaine de la Plaine par sa propriétaire Marie-Noëlle-Francis Sala, une petite histoire du cépage muscat par Jean Clavel, des poèmes de Stéphen Bertrand, Jean-Paul Creissac, Georges Drano, Jacquy Gil, James Sacré, Nicole Drano Stamberg, Pierre Tilman, Serge Velay, Marc Wetzel et Jean-Marie Petit. Tous les poèmes sont publiés en version bilingue occitan/français ou français/occitan, selon la langue dans laquelle écrit le poète. Ce sont Jean-Paul Creissac et Jean-Marie Petit qui se sont chargés des traductions en occitans.
Des photographies signées Laurent Delamotte et Georges Souche les accompagnent. Ce beau numéro montre aussi des oeuvres des plasticiens Jean-Paul Agosti, Joël Bast, Enan Burgos, Marie-Hélène Bikowa, Marie-Noëlle Git, Bérénice Goni et Jean-Pierre Rose. Une riche iconographie donc pour célébrer le divin brevage.
Parmi tous les poèmes présentés, en voici un de Jean-Paul Creissac, que j'ai choisi pour lui rendre hommage, afin de ne pas oublier que le poète occitan et le responsable des éditions Jorn, est aussi vigneron :
Vinhas e tròces
La vinha es un còs
Que l’òme n’es lo cap
E lo vin l’èime
Avetz desoblidats dins l’ivern de vòstras mans
Lo quichadis caud d’autras mans frairenalas
Setz anats per camins, per carreirons e per òrtas
Desvariats e estrangièrs a vosautres
La paraula clara que s’enauça
Es un cant que te pren e t’emmasca
La vinha es grand còs espandit
Vestit d’un lençòl de petasson al còr de l’estiu
Ta pèu rusca m’escarraunha las mans
Los dets ensagnosits sentisson pas mai lo freg
Contra vent e soberna
Aigat e tempesta
Sias aqui drech davant lo mas
La china te leca las mans
E de sègle en sègle
Se passa entre òmes
Aquel sentit prigond d’apartenença
A la tèrra
Acordança de dòl e de jòia
Aquel còs amanhagat
Te bailarà la frucha mai chucosa
La gruna mai madura
Lo most mai enchusclant
Dins la rasa, l’oliu
Sauvat de la manjança e dau fuòc
Per las mans de ton paire
La tèrra te parla
Las paraulas pasmens s’escantisson
Es que nos demòra la memòria ?
Vignes et morceaux
La vigne est un corps dont l’homme est la tête et
Le vin l’esprit
Vous avez oublié dans l’hiver de vos mains la poigne
D’autres mains fraternelles
Vous êtes allés par chemins et sentiers désorientés,
Etrangers à vous-mêmes
La parole claire qui s’élève est un chant qui te prend
Et t’ensorcelle
La vigne est un grand corps étendu, couvert d’un drap
Bigarré au cœur de l’été
Ta peau caleuse m’écorche les mains, les doigts ensanglantés
Ne sentent plus le froid
Contre vent et marée, inondation et tempête, tu es là
Debout devant le mas, la chienne lèche tes mains
De siècle en siècle se passe entre hommes
Ce sentiment profond d’appartenance à la terre
Accord de joie et de douleur
Ce corps caressé te donnera les fruits les plus beaux
Les grains les plus mûrs, le moût le plus fort
Dans la haie, l’olivier, sauvé des broussailles et du feu
Par les mains de ton père
La terre te parle
Les paroles cependant s’éteignent
Nous restera-t-il seulement la mémoire ?
Jean-Paul Creissac
Compléments :
- contact Humanisme & Culture : ngdrano@club-internet.fr
- Jean-Paul Creissac sur le site Cardabelle
Des photographies signées Laurent Delamotte et Georges Souche les accompagnent. Ce beau numéro montre aussi des oeuvres des plasticiens Jean-Paul Agosti, Joël Bast, Enan Burgos, Marie-Hélène Bikowa, Marie-Noëlle Git, Bérénice Goni et Jean-Pierre Rose. Une riche iconographie donc pour célébrer le divin brevage.
Parmi tous les poèmes présentés, en voici un de Jean-Paul Creissac, que j'ai choisi pour lui rendre hommage, afin de ne pas oublier que le poète occitan et le responsable des éditions Jorn, est aussi vigneron :
Vinhas e tròces
La vinha es un còs
Que l’òme n’es lo cap
E lo vin l’èime
Avetz desoblidats dins l’ivern de vòstras mans
Lo quichadis caud d’autras mans frairenalas
Setz anats per camins, per carreirons e per òrtas
Desvariats e estrangièrs a vosautres
La paraula clara que s’enauça
Es un cant que te pren e t’emmasca
La vinha es grand còs espandit
Vestit d’un lençòl de petasson al còr de l’estiu
Ta pèu rusca m’escarraunha las mans
Los dets ensagnosits sentisson pas mai lo freg
Contra vent e soberna
Aigat e tempesta
Sias aqui drech davant lo mas
La china te leca las mans
E de sègle en sègle
Se passa entre òmes
Aquel sentit prigond d’apartenença
A la tèrra
Acordança de dòl e de jòia
Aquel còs amanhagat
Te bailarà la frucha mai chucosa
La gruna mai madura
Lo most mai enchusclant
Dins la rasa, l’oliu
Sauvat de la manjança e dau fuòc
Per las mans de ton paire
La tèrra te parla
Las paraulas pasmens s’escantisson
Es que nos demòra la memòria ?
Vignes et morceaux
La vigne est un corps dont l’homme est la tête et
Le vin l’esprit
Vous avez oublié dans l’hiver de vos mains la poigne
D’autres mains fraternelles
Vous êtes allés par chemins et sentiers désorientés,
Etrangers à vous-mêmes
La parole claire qui s’élève est un chant qui te prend
Et t’ensorcelle
La vigne est un grand corps étendu, couvert d’un drap
Bigarré au cœur de l’été
Ta peau caleuse m’écorche les mains, les doigts ensanglantés
Ne sentent plus le froid
Contre vent et marée, inondation et tempête, tu es là
Debout devant le mas, la chienne lèche tes mains
De siècle en siècle se passe entre hommes
Ce sentiment profond d’appartenance à la terre
Accord de joie et de douleur
Ce corps caressé te donnera les fruits les plus beaux
Les grains les plus mûrs, le moût le plus fort
Dans la haie, l’olivier, sauvé des broussailles et du feu
Par les mains de ton père
La terre te parle
Les paroles cependant s’éteignent
Nous restera-t-il seulement la mémoire ?
Jean-Paul Creissac
Compléments :
- contact Humanisme & Culture : ngdrano@club-internet.fr
- Jean-Paul Creissac sur le site Cardabelle
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