Des hauteurs de la Provence s'envolent pensées et créations d'aujourd'hui

mercredi 8 mars 2023

Le souvenir de Raymond Bergerot (suite)

Voici un témoignage de Michel Capmal qui vient prolonger la chronique précédente consacrée à Raymond Bergerot. Se souvenant du festival des Voix Vives de 2011, Michel évoque aussi Claudio Salvagno dont la mort prématurée en 2020 nous avait tous bouleversés. En 2013, Claudio avait été l'hôte de ce blog.

En parcourant le programme de l'édition 2011 des Voix Vives, j'ai retrouvé le rendez-vous quotidien que j'animais de 20h à 21h, place de L'Hospitalet, et qui s'appelait : "Scène ouverte aux Sétois". Le dimanche 24 juillet, je recevais Raymond Bergerot pour les textes et Jacques Barthès pour la musique. Jacques a eu la gentillesse de me faire parvenir une photo de l'événement.

Je laisse maintenant la parole à Michel Capmal :

Raymond Bergerot

Je n’ai pas encore eu le plaisir de découvrir le recueil consacré à Raymond Bergerot par l’association Filomer, et dont le titre, le concernant, me paraît si bien choisi et émouvant : « Le poète inconnu dont le nom s’esperdu ». Mais je garde un souvenir persistant de ma rencontre avec lui lors du Festival « Voix vives » à Sète en 2011.

Devrais-je dire, d’abord et en passant, que n’ayant jamais été trop attiré par les grands rassemblements, quels qu’ils soient, je m’attendais à me faire cette réflexion « mais qu’est-ce que je fais là, moi ? » Finalement, tout s’est plutôt bien passé.

Donc, un soir, en plein festival, dans une petite rue du vieux Sète, nous étions quelques amis autour d’une table pour diner ensemble, et causer ! Florence Albré, Jean-Luc Pouliquen, Claudio Salvagnio, un très attachant et talentueux poète iltalien, aujourd’hui décédé lui aussi, auteur de L’autra Armada et de L’empiri de l’ombre, et Raymond Bergerot. Un vrai « type du Midi » à la grande vivacité d’esprit, à l’humour caustique communicatif, à la faconde intarissable, parlant de tout, se souvenant de tout. A cette époque il était très préoccupé par la lecture de la Kabbale. Que cherchait-il dans les arcanes de ce texte sacré ? En fait, et comme pour certains méridionaux, il y avait chez lui une gravité cachée devant les grands mystères de l’existence. Il nous a parlé aussi de sa famille, selon lui tous des artistes, des originaux dont il avait hérité une « âme » individualiste dans le meilleur sens du terme, autrement dit non moutonnière. Pour ce festival, il présentait chaque jour, si je me souviens bien, un groupe d’artistes et poètes locaux. « Hé oui, nous sommes les indigènes ! » disait-il avec un léger rire exprimant une mélancolique lucidité sur l’emprise des parisiens envers la culture occitane. Raymond était peintre et poète. Avec talent et sincérité.

Jean de Blanchard dans son atelier de Montpellier avec Michel Capmal 


En repensant ainsi à Raymond Bergerot de Sète, je me dois de faire un salut amical à son frère le peintre Jean de Blanchard de Montpellier. Et que nous avons bien connu fut une époque, Florence et moi. Il nous recevait dans son grand appartement près de la place de la Comédie, et nous faisait découvrir ses dernières œuvres. Des peintures exaltant le corps féminin dans tous ses états, sur toiles et aussi sur les quatre côtés de cubes en carton. Un artiste, un poète lui aussi.

Raymond aimait les chats, les femmes et la mer ? ! C’était un homme de goût. Un digne héritier des troubadours.

Michel Capmal - 4 mars 2023


 

samedi 25 février 2023

Le souvenir de Raymond Bergerot

J'ai déjà eu l'occasion de parler dans ce blog du festival de poésie Voix Vives de Sète. De 2010 à 2014, j'ai participé à son organisation et à son animation. C'est ainsi qu'en 2011, j'ai pu y inviter le poète Michel Capmal qui intervient souvent dans ces colonnes. Michel qui connaissait déjà le frère de Raymond Bergerot,  profita du festival pour le rencontrer. C'est ainsi que dans son sillage je fis aussi sa connaissance. Raymond nous invita à visiter son logement dans le Quartier Haut, nous montra quelques unes de ses toiles et nous fit lire certains de ses poèmes. Le festival permit aussi de passer une agréable soirée avec lui et de découvrir d'autres créateurs sétois à ses côtés. Je pense en particulier à Jacques Barthès que j'ai présenté il y a peu ici-même.

Raymond Bergerot nous a quittés le 27 Mai 2019. Ses amis de l'Association Filomer dont il était un membre fondateur ont souhaité lui rendre hommage en éditant un recueil de ses plus beaux poèmes. Ils sont accompagnés de reproductions de ses tableaux et de photographies de Jacques Barthès qui font écho à l'univers poétique de Raymond Bergerot. C'est Jacques Barthès d'ailleurs qui s'est chargé de la conception et de la mise en pages du recueil.

Marie-Ange Hoffmann brosse dans sa préface en quelques lignes un portrait chaleureux du poète : "Pour lui tout était sujet à poésie. Il aimait tous les êtres humains, mais surtout les femmes. Il aimait tous les animaux, mais surtout les chats. Il aimait toute la nature, mais surtout la mer. Il aimait tous les éléments, mais surtout le vent. Il aimait toutes les villes, mais surtout Sète et son Quartier Haut."

Nous partageons l'analyse qui est faite en quatrième de couverture de sa poésie: "Forte, elle touche à tous les thèmes essentiels. Du temps qui passe au mystère de la vie et de l'amour, du voyage poétique à la contemplations des paysages, de la Nature à un amour passionné des chats."

Le recueil se termine par un texte de Jacques Barthès qui raconte comment il a mis en musique un poème de Raymond Bergerot et comment cette collaboration souda leur amitié.  La partition réalisée à cette occasion  complète son témoignage.

C'est une des possibilités offertes par ce blog que de nous permettre d'écouter ce poème devenu chanson : 


Compléments : 

- Le recueil est vendu 10 € l'exemplaire + 5 € de port à commander à l'Association Filomer, 2 impasse de la Bordigue 34200 Sète (contact : filomer@orange.fr).

- Quand l'Association Filomer rendait hommage à Raymond Bergerot.

 


 

samedi 28 janvier 2023

Autour de "Liberté" de Paul Eluard

 Avec cette première chronique de l'année, nous allons écouter Paul Eluard lire son fameux poème Liberté. Il est l'occasion pour moi une nouvelle fois d'évoquer Gaston Bachelard qui l'a souvent cité dans ses livres. Ne commence-t-il pas sa Psychanalyse du feu par cette phrase de lui : "Il ne faut pas voir la réalité tel que je suis" ?

Avant d'être lâché à des milliers d'exemplaires par des avions de la R.A.F. sur le sol français, le poème avait été publié dans un recueil intitulé Poésie et vérité 42. C'est le groupe de jeunes poètes surréalistes de La Main à plume qui s'était chargé de l'édition. Il comptait parmi ses membres Nadine Lefebure qui suivait dans ces années de guerre les cours de Gaston Bachelard en Sorbonne avec attention. Elle y trouvait là des raisons de résister à l'Occupant et de garder espoir.

Parmi les nombreux autres étudiants passionnés par les cours du grand philosophe qui composaient l'auditoire, se trouvait le poète et essayiste Georges Jean qui écrira plus tard dans un livre intitulé Bachelard l'enfance et la pédagogie : "  Nous étions quelques-uns à "tenir" tout au long de la première séquence pour avoir une place lorsque la poésie ferait son entrée. Cette expression n'est pas une image, car effectivement, au moment où Bachelard retournait, comme il disait, son tablier ainsi que le Maître Jacques de Molière, les poètes arrivaient et c'est à l'occasion d'une "interclasse" que nous reçûmes le précieux fascicule d'Eluard Poésie et vérité 42 qui contenait Liberté."

Mais il est temps d'écouter Paul Eluard : 


Compléments :

- On pourra lire de Nadine Lefebure Anecdotes hors philosophie dans le n°5 des Cahiers Gaston Bachelard publié par l'Université de Bourgogne en 2002.

- Bachelard l'enfance et la pédagogie de Georges Jean a été publié par les éditions du Scarabée en 1983.