Des hauteurs de la Provence s'envolent pensées et créations d'aujourd'hui

samedi 29 juin 2013

Présence de Charles Galtier - V

Voici pour terminer cet ensemble, le témoignage de Pilar Blanco qui était déjà intervenue dans ce blog pour nous parler de sa traduction de Frédéric Mistral en espagnol. C'est d'ailleurs en allant sur ses traces qu'elle avait fait la connaissance de Charles Galtier et établi le lien entre la littérature provençale d'hier et celle d'aujourd'hui. J'ai choisi de présenter cet hommage émouvant en plusieurs parties ce qui nous permettra de cheminer encore avec Charles Galtier jusqu'au mois de juillet.


 CHARLES GALTIER, GRAND ÉCRIVAIN
 ET AMI DE SES AMIS

J’ai connu M. Galtier dans les années soixante-dix, si je me souviens bien, c’était en 1977. À ce moment je travaillais sur ma thèse doctorale  Nerto : poème de Frédéric Mistral. Profitant  de mes vacances de Pâques à la Fac, j’ai voyagé, pour la première fois en Provence à la recherche des traces de Mistral et des personnes qui parlaient encore le provençal.

Grâce à un professeur de ma fille aînée je me suis retrouvée chez ses parents, à Carpentras, avec un monsieur qui était âgé de quatre-vingt-douze ans et qui parlait la langue de Mistral, de même que toute sa famille et la famille de mon amie. Ils m’ont reçue avec un dîner de Noël et ses treize desserts. Durant ce long repas ils m’ont parlé de personnes qui pouvaient m’aider à retrouver tout ce que je cherchais : Marie Mauron et Charles Galtier parmi d’autres, mais il fallait les avertir.

 Le lendemain matin je suis allé visiter la Bibliothèque Inguimbertine de Carpentras, où j’ai trouvé assez de documents intéressants dans les premiers numéros de l’Armana Prouvençau.

Le jour suivant je suis partie à Saint-Rémy-de-Provence rencontrer Marie Mauron, une dame réellement merveilleuse, assez âgée déjà, mais avec une tête splendide, née en 1896 et qui avait connu Mistral. Elle avait 18 ans à sa mort, le 25 mars de 1914. J’ai pris des notes de notre conversation qui m’a beaucoup enrichie.

Comme je voulais visiter et connaître Maillane et surtout le Musée de Mistral, je devais retrouver son bibliothécaire, c’est-à-dire,  M. Galtier, le conservateur du musée. Arrivée sur place, je me suis adressée à Madame Cornillon, maire de Maillane, pour lui dire que je souhaitais le voir. Elle lui a téléphoné pour lui expliquer « qu’il y avait là une dame espagnole, professeur d’Université, qui préparait une thèse sur Fréderic Mistral et qu’elle aimerait bien voir les archives ».

La réponse de M. Galtier fut une grande surprise pour moi. Étant donné qu’il habitait à Eygalières, je pensais que ce serait difficile de le rencontrer. Sa réponse pourtant fut positive, je devais seulement attendre l’après-midi. Comme je voyageais toujours avec la famille, nous avons fait une promenade dans la ville puis nous avons déjeuné dans le restaurant qui était face à la maison de Mistral.

M. Galtier est arrivé assez tôt. On s’est salué et on a parlé de mes intentions concernant l’œuvre de Mistral. Il semblait content. On a beaucoup échangé sur Mistral et pourquoi j’avais choisi cet auteur, apparemment encore peu connu du grand public. On a visité le musée et à la fin de notre rendez-vous, il m’a offert deux de ses livres : S’il reste encore un pas et L’erbo de la routo. Je n’avais pas réalisé que lui-même était un écrivain.

Je devais rentrer en Espagne et nous avons pris rendez-vous pour le mois de juillet où je resterai le mois complet en Provence pour pouvoir faire des recherches pour ma thèse au Musée.

Mais avant de partir il me demanda si j’aimerais visiter le Mas du Juge, la maison où Mistral est né et a passé son enfance. C’est une maison qui n’était pas ouverte au public, m’a-t-il-dit, une propriété privée où habitait une famille, qui n’aimait pas qu’on la gêne avec des visites.  Mais pour nous elle sera ouverte. Alors nous avons eu la chance de pouvoir la visiter grâce à M. Galtier à qui les propriétaires ouvraient leurs portes pour nous montrer un peu du célèbre mas.

Vous ne pouvez pas imaginer ma joie. En plus, j’avais la permission de faire des photos dans la cuisine où était conservé presque tout le mobilier de la maison de Mistral-père, la table à manger avec ses tiroirs et le nom de Frédéric Mistral-fils qu’il avait taillé avec son couteau à l’intérieur du tiroir ; la plaque de marbre blanc avec les vers des Isclo d’or  devant la cheminée et à l’extérieur de la maison, le ruisseau si cher à Mistral et où il était tombé plusieurs fois pour aller cueillir « li  flour de glaujo » qu’il a tant aimée. (Je conserve toujours « li flour de glaujo »  que j’ai cueillie, desséchée dans un livre des classiques provençaux, le nº 2,  Frédéric Mistral : Memòri e Raconte).

En une semaine, j’avais posé les bases pour mon travail et, sans le savoir, entamé une longue et véritable amitié.

                                                                                                                                      Pilar Blanco

samedi 22 juin 2013

Présence de Charles Galtier - IV

Nous continuons ce mois d'hommages à Charles Galtier par le témoignage émouvant de ses neveux Roselyne et Thierry que je remercie vivement pour leur aide et leur soutien à cette initiative qui, je l'espère, sera suivie de beaucoup d'autres pour donner à ce grand poète toute la place qui lui revient dans la culture provençale et la littérature universelle.

TONTON CHARLES

Pour nous tous, neveux et petits-neveux, Charles Galtier, c’était : Tonton Charles. Il était un passeur de savoir qui pouvait transformer un moment banal du quotidien en conte. Il avait gardé l’imagination de l’enfance, la pureté des mots des grands poètes, leur clarté absolue.
Son grand âge n’avait en rien diminué sa créativité, comme le montre le dernier livre paru de son vivant Un vin qui fait danser les chèvres. Il avait conservé sa curiosité, cette envie d’apprendre et d’aider les autres qui transparait dans son ouvrage posthume Les Oiseaux de Provence, bestiaire magnifique, d’une richesse exceptionnelle, nourri de savoir populaire.
C’était un Être qui avait compris l’essentiel : L’AMOUR. L’amour pour sa femme, Thérèse, qu’il avait épousée très jeune et à qui est dédié son dernier livre. L’amour pour sa famille, sa mère, son frère, ses sœurs, ses neveux et petits-neveux.
Ses yeux s’illuminaient dès notre arrivée. Il s’installait dans son fauteuil, son petit cigare au coin des lèvres, le sourire doux et le regard bienveillant. Penseur généreux, à l’écoute du monde à travers nos récits.
Il nous posait des questions sur notre vie, nos voyages, nos centres d’intérêts et se rappelait quelques souvenirs. L’un d’entre eux nous a particulièrement marqué et concerne ses années d’étude à Barcelonnette.
Il nous parlait de ces belles demeures où habitaient des personnes qui avaient fait fortune au Mexique et étaient revenues ensuite dans la vallée de l’Ubaye, leur terre natale, là où se trouvaient leurs racines.
Il y consacre d’ailleurs une partie de son roman Le chemin d’Arles. Nous comprenions alors ce que signifiait pour lui les mots : « Ne jamais oublier d’où l’on vient ».
L’amour de la nature se manifestait chez lui par son observation minutieuse. Il nous expliquait les arbres, les oiseaux, les cigales… C’était un humaniste en harmonie avec la Terre et le Ciel,
Bien sûr, comme écrivain, il avait l’amour des mots. La beauté poétique de son langage en révélait même la passion. Il s’intéressait aux dictons, aux proverbes, aux fables… mais aussi aux coutumes qu’il a eu à cœur de transmettre aux générations futures par ses travaux de recherche.
Tout en étant présent à l’instant, il pensait aux autres.
Voyageur immobile, des projets plein la tête, entouré de livres et de papier, il avait compris que l’essence du monde et l’infini sont tenus dans l’infiniment petit. C’est pourquoi il était si humble.
C’était un vrai sage, un contemplatif.
MERCI  à toi, Tonton Charles !
                                                                                                                                 Roselyne et Thierry

samedi 15 juin 2013

Présence de Charles Galtier - III

Nous avons choisi d'accorder dans cet ensemble de chroniques, un place importante aux proches de Charles Galtier. Nous pensons en effet que c'est une chance de pouvoir bénéficier de leurs témoignages et qu'ils nous aideront à percevoir toute l'épaisseur humaine de l'écrivain, celle qui a donné à son œuvre son rayonnement. Nous laissons donc la parole à sa nièce Nicole et à sa petite-nièce Florence.


Être la nièce de Charles Galtier, c’est avoir hérité d'une richesse exceptionnelle. C’est avoir eu pour oncle un Sage, un passionné du savoir, une personne humble, aimante. Il éprouvait un immense amour pour sa femme mais nous disait aussi penser à chacun de nous, tous les soirs avant de s'endormir. C’est se souvenir de ses chiens, de sa poule Rebecca qui déambulait dans la maison… C'est revoir son visage qui s'illuminait lorsqu'il nous parlait de ses œuvres en projet et entendre son rire discret lorsqu’il évoquait certains personnages de ses pièces. En tant que petite-fille de Rose Boiron, sa sœur, elle aussi artiste, c'était m'imprégner de leur culture lorsqu'elle lui montrait ses tableaux évoquant le passé, souvent empreints de souvenirs d'enfance... Il avait choisi l'un d'eux : "Les fenouils" pour le frontispice de Premièro garbo/Première gerbe édité par L'Astrado.
Je suis aujourd'hui souvent surprise et agacée par la prétention de certains hommes car notre oncle au savoir et à l’intelligence si étendus avouait qu’il ne possédait qu’une infime partie de la connaissance. Nous, neveux, petits-neveux et arrière-petits-neveux sommes très riches de l’avoir connu, côtoyé et aimé.
                                                                                                                                               Nicole


Quand je pense à tonton Charles, je me rappelle un homme captivant, un peu hors du temps et immuable. Il a toujours était le même physiquement et c'est nous qui avons grandi et l'avons apprécié de différentes manières. Petits, il nous faisait des tours de magie avec des pièces qu'il ressortait de derrière nos oreilles, plus grands on était fier de dire qu'on avait un oncle écrivain et qu'il ait reçu la légion d'honneur. Pour l'entrée au collège, il conseillait quelle langue apprendre grâce à son esprit visionnaire. Quand on se posait une question, à l'époque ou Internet n'existait pas, on se disait : on demandera à Tonton. C'était notre ressource de savoir et d'explications.
Pour chaque séjour à Eygalières, la visite à tonton Charles faisait partie du rituel. Je regarderai toujours son ancienne maison le cœur gros de souvenirs et avec un petit pincement de ne pas avoir été en âge d'apprécier vraiment quelle source de vie et de connaissance il était.
                                                                                                                                          Florence
 

samedi 8 juin 2013

Présence de Charles Galtier - II

Nous continuons aujourd’hui notre hommage à Charles Galtier, par un entretien avec Patricia Dupuy qui a été son éditrice. Elle est en effet responsable de la rédaction du journal Prouvènço d’Aro et des éditions du même nom. Patricia Dupuy a déjà été accueillie dans ce blog puisque j’ai eu l’occasion en octobre dernier de présenter son livre Le parler provençal.

Patricia comment avez-vous été amenée à rencontrer Charles Galtier ?

J’ai rencontré Charles Galtier, dans les années 80.
Je ne faisais pas de provençal et j’étais loin de penser qu’un jour je ferai de l’édition.
Ceux de notre âge se souviennent que les années 80/85 ont été les années de création des radios locales.
Je participais à une émission sur une radio locale à Marseille qui s’appelait “Point Virgule”. Je faisais la technique et les photos. Notre émission littéraire présentait chaque semaine un écrivain marseillais, régional ou éventuellement un écrivain connu de passage à Marseille. Notre première entrevue a été, par exemple, avec Serge Bramly pour La danse du loup, en 1982.
Et c’est ainsi que Charles Galtier nous a reçu chez lui à Eygalières pour la sortie d’un de ses livres, bilingue, Lou nis dóu calao (1981).
Evidemment, nous avons parlé en français. Nous ne connaissions pas Charles Galtier. Nous ne nous doutions même pas qu’il était un des écrivains provençaux les plus connus et les plus productifs.
Et je me souviens que mon collège (un Vendéen) a posé une question qui me fait honte aujourd’hui : il lui a demandé s’il parlait provençal! Mr Galtier a répondu oui, bien gentiment.
Heureusement, Mr Galtier, quand je l’ai rencontré pour la deuxième fois, bien des années après, ne se souvenait pas de cet entretien…

Parlez-nous de cette deuxième fois.

C’était à Maillane, un 25 mars (mais je ne me souviens plus de l’année…) pour la commémoration de la
mort de Frédéric Mistral qui a lieu toutes les années à Maillane le 25 mars : discours au cimetière, discours devant la maison du Maître et apéritif au Centre Frédéric Mistral.
Avant que je prenne en charge les éditions Prouvènço d’Aro, mes prédécesseurs venaient d’éditer Coumèdi en un ate (1989). Mr Galtier n’aimait pas le monde, mais il venait à Maillane en tant que conservateur du Musée Frédéric Mistral de Maillane.
Il était assis sur une chaise, il était déjà âgé. Je me suis mise à genoux, à côté de lui et je me suis présentée. Il a été charmant, comme à son habitude. Il ne parlait pas fort et ne parlait pas trop avec les autres personnalités.
À Maillane, ce jour-là et à cette époque, il y avait un grand repas organisé par le Félibrige où les majoraux étaient invités. Mr Galtier était majoral à la Cigalo de Durènço.
Il m’a demandé si je voulais dîner à ses côtés à ce repas. J’ai refusé car je ne connaissais personne de ce monde-là et j’étais un peu gênée d’accepter.

Vous faites bien de rappeler les liens qui unissent Charles Galtier à Frédéric Mistral : Conservateur de sa maison à Maillane, Majoral du Félibrige et aussi premier lauréat du Prix Mistral en 1946 avec ses  deux recueils de poèmes La Dicho dóu Caraco (La chanson du bohémien) et Dire Ninoi pèr la Ninèio (Naïveté pour les enfants) ainsi que son drame, Li Quatre Sèt (Carré de Sept). À votre tour, avec vos éditions, vous alliez permettre à son œuvre de continuer à rencontrer son public.

Mr Galtier a édité chez de nombreux éditeurs régionaux (Parlaren, Grandir, Les Cahiers de Garlaban, Edisud, L’Astrado) ou non (Gallimard, Horvath, Ouest France). Il nous a demandé un jour de publier ses nouvelles sous les titres de La Sereno (La Sirène, 1991) et La Pèiro d’aiglo (La pierre d’aigle, 1996). Le premier rassemble 7 nouvelles dont “La sirène”, en provençal, qui raconte comment la sirène accompagne le corps d’un mort qui descend le Rhône : toutes les âmes hantent le Rhône la nuit de la Saint Médard… Le second réunit aussi 7 nouvelles dont “La pierre d’aigle”, en provençal/français, pierre que l’on va chercher dans l’aire d’un aigle et qui aide les femmes qui ne peuvent pas avoir d’enfant.
 Mr Galtier  n’a pas édité que des nouvelles pour les enfants. Certains de ses contes sont noirs, donnent à réfléchir, ou parlent de légendes mystérieuses pas très connues : tous ne finissent pas bien.
Malgré son écriture d’une grande clarté dans une belle langue provençale simple, il semble oublié. Seules ses Comédies en un acte intéressent encore un peu les troupes de théâtre qui jouent en provençal.

La Provence qu’évoque Charles Galtier dans ses livres se rattache à un monde rural qui n’existe plus. Peut-être faudra-t-il se perdre encore un peu plus dans les turbulences de la ville pour y revenir. Sa poésie condense toute sa sagesse et sa vision du monde. Vous en avez aussi éditée.

Effectivement nous avons édités Nouvèu Tros (Nouveaux fragments, 1998), cinquante poèmes courts
. Nouveaux parce qu’il avait édité Tros (Fragments) en 1986. Il avait déjà à son actif une quinzaine d’ouvrages en vers, dont le premier est sorti en 1949. Parallèlement à son œuvre en prose, il a toujours écrit des poèmes. Comme il était un homme très discret, je le qualifiait d’”homme intérieur”, ce qui pour moi signifie qu’il exprimait par la poésie ce qu’il ne pouvait pas nous dire.

Quouro more uno estello au founs de l’estelan,
Dison que se veira li milanto milo an
Que vai metre sa lus pèr d’amoundaut descèndre.

Mai dins un vira d’iue, escapado à la niue,
La belugo que siéu s’amosso dins li cèndre.

Lorsqu’une étoile meurt au sein du firmament,
on dit qu’on la verra pendant des millénaires
que mettra sa clarté pour venir jusqu’à nous.

Mais dans un bref clin d’œil, s’arrachant à la nuit,
s’éteindra la lueur de celui que je suis.

(trad. de Ch. Galtier)

Ses fragments sont très courts (5 à 6 vers), et sont tournés vers la terre ou les éléments célestes et sonnent comme des maximes mais riches de poésie. Il faut les lire plusieurs fois car ils donnent à méditer.

La mostro à soulèu
Te dira pas l’ouro
Touto fes e quouro
Se tapo lou cèu
Aprouficho dounc di jour  que fai bèu.

Le cadran solaire
Ne dit pas l’heure
Lorsque les nuages
couvrent le soleil.
Mets donc à profit les jours de beau temps.

Merci Patricia pour ce témoignage. 

Compléments:
- Le site des éditions Prouvènço d’Aro.
- Contact :   lou.journau@prouvenco-aro.com

samedi 1 juin 2013

Présence de Charles Galtier

Cette année 2013 est l'année du centième anniversaire de la naissance de Charles Galtier qui était né le 15 janvier 1913 et nous a quitté le premier janvier 2004. Le 18 août dernier, j'avais eu l'occasion d'évoquer son souvenir en présentant son recueil Lis alo de l'auceu, li racino de l'aubre / Les ailes de l'oiseau, les racines de l'arbre que j'avais eu la grande joie d'éditer aux Cahiers de Garlaban. Charles Galtier fait partie de ces poètes qui m'ont laissé un souvenir heureux et fort par la haute humanité qui se dégageait de sa personne. Pour marquer ce centième anniversaire j'ai décidé de le célébrer tout au long du mois de juin et jusqu'en juillet. Et pour commencer voici un poème que lui avait dédié son aîné et ami Jòrgi Reboul qui m'avait permis de faire sa connaissance.

Charles Galtier photographié en 1997 par Maurice Rovellotti

CARLES D'EIGALIERAS

                                                                A Teresa Galtier

As la man fada
de teis aujòus d'aperailà

M'es estat dich que
dins la cort de ton escòla
garissiás dau tocar lei pitoets
d'un mau de dènts ò de sei gibas
e secavas boniàs son plorum.

Emmascatgi?... Aquò's fisic!...
Caminavas

Un vèspre venguères m'atrobar
au 15 de Riba-Nòva de dabàs
l'obrador de VALÈRI BERNARD
la casqueta a la man
prim  crentós  novelari
ambé ton uscle de Caraco

Para la man !

T'adralhèri devèrs leis Aigas-Vivas
d'un que voliá de bèn a nòstra Joventut
nòstre Marsyas   fraire grand de l'Autre
espelhat tot viu per aver devinat
lo secrèt d'Apollon.

Caminères.

*

CHARLES D'EYGALIERES

                                                                            A Thérèse Galtier


Tu as la main prédestinée
de tes lointains aïeux.

On m'a rapporté que
dans la cour de ton école
tu guérissais   au toucher   les enfants
d'un mal aux dents ou leurs bosses
et   bon-homme   tu séchais leurs pleurs

Ensorceleur? Simples tours de physique, disais-tu!
Tu cheminais.

Un soir   tu vins me trouver
15 de Rive-Neuve   au bas
de l'atelier de VALERE BERNARD
en me saluant
fin   craintif   et novice encore
avec ton hâle  de Caraque .

Bienvenue!

Je t'aiguillai vers les Aigues-Vives
de celui qui lançait notre Revivre
notre Marsyas  frère-grand de l'Autre
qui fut écorché vif   pour avoir deviné
le secret d'Apollon.

Tu cheminas.

                                                                     Jòrgi Reboul

Compléments :
- Le poème est extrait de Pròsas Geograficas édité par Vent Terral en 1985 avec une préface de Jean-Marie Petit.