Des hauteurs de la Provence s'envolent pensées et créations d'aujourd'hui

samedi 29 septembre 2012

Un bout de chemin avec Bernard Perroy - V



Si Bernard Perroy a pu manifester par différents ouvrages son amitié et son dialogue inter-religieux, ou bien encore sa description d’un « extraordinaire du quotidien », il y a toujours chez lui une dimension d’espérance et de prière qu’il ose explicitement aborder dans l’un de ses derniers recueils Une joie tremblante. Cette joie serait de « celle de ces femmes myrrophores tandis que le jour se lève sur le mystère du tombeau vide » écrit le poète en exergue. Ce n’est pas le confort d’une joie factice ou triomphante, car cette joie est souvent vulnérable, s’accompagnant de toute la palette des sentiments humains… Mais l’auteur, dans une alternance de proses et de vers libres, espère ici que la poésie « déborde » le simple fait d’une foi exprimée, dans ce « je ne sais quoi » qui se rencontre d’aventure…

Nos âmes,
de la terrasse,
étendent leur soif
sur la beauté des choses…
Saisir
les petits événements
qui passent
et se métamorphosent.
Trouver la part du ciel
dans l’éclosion promise
du mimosa…
                 (à Jean-Pierre Lemaire)

*

- Leçon de chose -
La pensée brève et le cœur en chemin s’exercent à voir, à entendre, à toucher… Nos pas s’étonnent des bavardages du gravier, des bourgeons découverts à l’ombre d’un rosier, des notes volatiles qui fusent du buisson, d’un silence sans cesse à éclore dont les profonds gisements sous-tendent notre marche, tandis que ton nom berce les fibres de nos êtres, les recouvre de sa tendresse, aime en nous ce qui ne peut comprendre,
ce qui ne se dispose qu’à goûter…

*
Toucher du doigt, des yeux,
ce que la matière recèle
des chatoiements de l’invisible…

***

Voici pour terminer ce mois avec Bernard Perroy et donner envie de continuer le chemin avec lui, sa bibliographie :

- Une joie tremblante, préface Jean-Pierre Lemaire, Ad Solem, 2012
- La nuit comme le jour, préface de Gérard Pfister, Le Nouvel Athanor, 2012
- Sur la plus haute branche, Sac à Mots, 2011
- Si nous savions vraiment…, La Porte, 2011
- Une gorgée d’azur (49 encres de Rachid Koraïchi), Al Manar, 2011
- Petit livre d’impatience, préface de Pierre Dhainaut, Petit Pavé, 2011
- Cœur à cœur (49 encres de Rachid Koraïchi), Al Manar, 2006
- Un soir où le soleil d’octobre…, préface de Gilles Baudry, Sac à Mots, 2005
- Un souffle de clarté, Hors Jeu, 1998
- Le calice des jours, Abbaye de Meilleray, 1997 (épuisé)

Collaborations

- Jean Mambrino, poète de la lumière, Les Cahiers Bleus, 2005
- Arbres bleus (sur 15 photographies de Dominique Lefevre), Photame, 2007
- Gros plan sur Gilles Baudry, Dossier de la revue Friche, n° 103, décembre 2009
- Miroir pour l’arbre, peintures Nathalie Billecocq/textes Bd Perroy, expo à l’ENSIP Poitiers, mars 2011
- « Ce qui s’approche à bruit d’abeille » : sur le mystère, Les Cahiers du Sens n° 22, 2012

Présence en anthologie

- Début de siècle, anthologie franco-québecoise, Cahiers du Sens/Moebius, 2012
- Visages de Poésie, Tome 4, J. Basse, Rafael de Surtis, 2010
- L’année poétique 2008, P. Delbourg, J.L. Maxence, F. Trocmé, Seghers, 2008
- Anthologie de la prière contemporaine, J.L. Maxence, Presses de la Renaissance, 2008
- 365 méditations sur les chemins de Compostelle, Yvon Boëlle et Luc Adrian, Presse de la Renaissance, 2006
- Mur à poèmes, “des mots pour la paix”, Maison de la Poésie Nord - Pas-de-Calais, 2006
- Vous avez dit “Poésie” ?, Sac à Mots. 2003
- Trio poétique - Tome 7 (avec G. Marquès et B. Gaudy), Les Amis de Thalie, 2003
- Avec toutes mes excuses, Médiaspaul, 2003
- Sur la page où naissent les mondes, de Christian Bulting, ACL-Crocus, 1988

Présence en revues

Arpa, Friches, 7 à dire, Laudes, Hors Jeu, Les Amis de Thalie, Le Coin de Table, Les Cahiers de la rue Ventura, Pages insulaires…

Sur le net

samedi 22 septembre 2012

Un bout de chemin avec Bernard Perroy - IV


Pour cette quatrième étape, voici des extraits de trois autres  recueils de Bernard Perroy qu’il définit ainsi : « des mots, des signes échoués sur l’établi du temps, rendre compte de notre traversée, celle de chacun, chemin de crête ou de brume, ruisseau discret, regard à l’écoute de cet "extraordinaire du quotidien" (Gilles Baudry), recueillir tout cela dans la corbeille de nos pages, recueil après recueil, petits tas de sable, de mots, de marges, depuis les rires jusqu'aux tempêtes intimes, hauts et bas, sources et racines, chemin toujours à venir et pépites d'or dans l'océan de la nuit...

Chaque matin
reprendre pied,
prendre position
malgré tout ce qui contrecarre
et nous écarte de la vie…

Le chant
reste fidèle dans le cœur,
mais souvent
trop enfoui…

Tout réapprendre du regard,
du toucher,
des mots, souvent les plus anodins,
qui reconstruisent…

*

C’est là qu’on entend tout bas en soi
le chant du temps et celui-là même de ton visage,

d’un bercement, d’un baume versé sur toute plaie,
d’une réconciliation, l’accord parfait parfois

entre l’alchimie du manque
et l’expérience d’une plénitude

Page après page

Ces pages d’encre et ces forêts de livres
qui s’entassent depuis des siècles,

est-ce mémoire, carnets de vie,
nostalgie d’un futur qui s’éloigne
au fur et à mesure
que l’on s’approche de lui ?

Tissu et entrelacs de mots
mis sur vélins, sur papyrus
et toutes sortes de fibres,

cordes tendues pour quel horizon,
pour quel éveil,
pour quel apaisement des fibres de nos coeurs?

            (à Nathalie Billecocq, sur l’une de ses peintures
 tirée de l’ensemble : « Miroir pour l’arbre »)

Le fruit suspendu…

Le fruit suspendu
se dépêche de tomber
dans l’herbe mouillée,

petit événement
qui entre dans le grand catalogue
des faits ignorés…

L’eau s’évapore
et le soleil réchauffe les bottes de foin,
et tout ce qui s’offre à mains nues…

Le temps pourrait s’arrêter là
mais il poursuit son chemin
dans l’aventure des coeurs…

                    (à Gérard Bocholier)
(souvenir du Maramures, Roumanie)


Je brûle du vent
qui dort
sous mes paupières.

Le corps s’abandonne
aux rêves d’absolu.

Et l’âme sait
qu’elle ne sait rien
que ce bouton d’or
planté au cœur
de la nuit nue.

(Poèmes de Bernard Perroy) 

Compléments :
- Petit livre d'impatience sur le site des éditions du Petit Pavé






samedi 15 septembre 2012

Un bout de chemin avec Bernard Perroy - III


Nous proposons aujourd'hui des extraits des deux recueils présentés précédemment où les encres de Rachid Koraïchi répondent aux mots de Bernard Perroy pour former un poème unique.

Extraits de « Cœur à cœur »

Un feu dont l’origine
Est là devant nous
Comme la promesse d’un monde à venir


Par-delà les corps
La vie cachée de l’enfant blessé
Réfugié en chaque homme


Ces riens toujours à l’orée de nos cœurs
Pour que grandisse en nous
Un ciel nécessaire
À notre vie profonde


Extraits de « Une gorgée d’azur »

Le ciel bleuit
que la mer accompagne…

Tas de sable
sur le rivage,

les enfants jouent
comme des rois…

Et par-delà les cris,
les sourires,

l’azur des cœurs
chante tout bas…


D’impression en impression,
dans un fouillis d’ordre ou
d’émotions,

l’eau, les pleurs, les sueurs, les salives,
jaillissent du manque
ou de la plénitude,

lavent les plaies enfouis,
que transparaisse, venu du fond,
ce que les mots décidément
n’arriveront jamais à transcrire…


Arbre,
apprends-moi
les richesses du ciel

comme ces fruits
suspendus à ton corps,

éclos des pluies
et du soleil,

échos de noces invisibles
entre l’azur
et l’obscur de la terre…


(Poèmes de Bernard Perroy, encres de Rachid Koraïchi ) 
Tous nos remerciements aux éditions Al Manar de nous avoir autorisés à les présenter dans ce blog.

Supplément :

- L'art, le signe chez Rachid Koraïchi par Bernard Perroy



samedi 8 septembre 2012

Un bout de chemin avec Bernard Perroy - II

Pour cette deuxième étape, nous allons nous attarder sur la rencontre de Bernard Perroy avec Rachid Koraïchi, évoquée précédemment. Ils se sont connus en 1994 à l’Abbaye Blanche en Normandie qui fut durant de nombreuses années un lieu d’art, de prière et d’unité. Rachid Koraïchi a participé activement à la vie de ce lieu tout en y exposant régulièrement. Il est né en 1947 à Aïn Beïda, en Algérie, et vit actuellement à Paris. Il expose depuis 1970 dans différents musées et fondations à travers le monde. Outre son œuvre personnelle, il collabore auprès de nombreux écrivains et poètes (Sylvie Germain, Nancy Huston, Salah Stétié, Michel Butor, Georgia Makhlouf, Anne Rothschild…). Avec Bernard Perroy, il a réalisé deux livres dont voici une brève présentation :


« Cœur à cœur » – Bernard Perroy – avec 49 encres de Rachid Koraïchi, éd. Al Manar (2006)
Sept fois sept, quarante-neuf… C’est le nombre des courts textes de Bernard Perroy et des encres de Chine de Rachid Koraïchi, qui se confondent en un seul chant, en un seul poème de sept parties. Pour les deux hommes, dont les parcours se rejoignent, le chiffre sept est d’importance… Chiffre parfait, chiffre de plénitude. Il est entre autres à rechercher en marchant, en vivant, en dessinant, en écrivant, en aimant… Sept, le chiffre du « mystère rayonnant ». Et s’il y a une perfection à rechercher ici-bas, ce serait bien avant tout, pour les auteurs, celle du cœur…
ISBN 2-913896-44-8


« Une gorgée d’azur » – Bernard Perroy – avec 49 encres de Rachid Koraïchi, éd. Al Manar (2011)
Poème unique en sept parties de sept poèmes (et un interlude), poème d’encre et de mots… Une gorgée d’azur nous invite à nous aventurer dans la « partition indigo de la vie », à céder à la « tentation du bleu » qui se livre continuellement du « dedans » ou du « dehors » de nos cœurs… Cette « part azurée » pourrait signifier cette part de mystère et de joie qui nous habite malgré toutes les difficultés de la vie… Laissons-nous bercer par cette mélodie des mots et des images « pour vivre seulement de cela / qui perle du cœur / comme l’azur / à toute heure, / quel que soit l’écho / des larmes versées / ou des bonheurs. »
ISBN 978-2-913896-89-5

samedi 1 septembre 2012

Un bout de chemin avec Bernard Perroy

Nous allons consacrer ce mois de septembre à Bernard Perroy en faisant un bout de chemin avec lui.

Bernard Perroy est né à Nantes en 1960. Il est allé à Rennes pour étudier la philosophie, mais s'est retourné finalement vers la kinésithérapie qu’il a pratiquée tout en menant une existence de rencontres en poésie et en musique… Après une période de vie « mouvementée », il poursuit depuis 1988 sa double vocation de poète et de frère consacré. Il vit actuellement en Sologne.
En 1994 il rencontre Gilles Baudry qui le mène à Hélène Cadou, Serge Wellens, Jean-Pierre Lemaire, Gérard Psfister, Pierre Dhainaut, Gérard Bocholier, Anne Perrier, Jean-Claude Coiffard et tant d’autres… Présent en revues et en anthologies, il a publié une dizaine de recueils. Ses textes sont à la croisée du visible et de l’invisible, où paysages intérieurs et extérieurs se répondent. Les mots se font également l’écho de ses voyages notamment comme journaliste au mensuel Feu et Lumière (Égypte, Liban, Roumanie, Arménie, Israël…) et témoignent souvent de son amitié avec nombre d’artistes (poètes, peintres, sculpteurs, musiciens, photographes…) d’horizons culturels très divers avec lesquels il aime collaborer (ouvrages, expos…).
Sa rencontre, également en 1994, avec le plasticien algérien Rachid Koraïchi, d’origine soufie, l’amène à une amitié et une collaboration interreligieuse où les encres et les mots se répondent. Un autre exemple de collaboration : Miroir pour l’arbre, où le poète « commente » à sa façon les peintures de Nathalie Billecocq…
Les textes que nous allons présenter tout au long du mois, inédits ou tirés de ses recueils et collaborations, transmettent un peu de cette « traversée » que nous avons tous à vivre, de ce « chemin des surprises » dont les mots sont la trace, « échoués sur l’établi du temps »…
En voici un premier :

 L’armoire s’ouvre,
et la fenêtre à deux battants.

Il entre dans la pièce
un léger coulis d’air
aux notes blanches,

et la lavande dans l’armoire
distribue ses parfums
qui se laissent rejoindre
par le parfum des fleurs
et des plantes sauvages,
dehors,

tandis qu’à l’intérieur,
les yeux de la solitude
se laissent laver
par tant d’accords.


(extrait de La nuit comme le jour,
préface G. Pfister, éd. Le Nouvel Athanor, 2012)

Nous le complétons par quelques commentaires sur la poésie de Bernard Perroy :

« Oui, vous y semez, tous les poètes, à vrai dire quand ils sont justes, disent l’espoir, ce sont bien des racines et des sources, ils nous font entendre cette voix frêle, la seule intense, la seule sûre, la vôtre parce qu’elle est aussi celles de tous. » Pierre Dhainaut

« Je veux vous dire le plaisir que j’ai eu : une joie complice à la lecture de vos poèmes chargés de lumière. » Yves Perrine

« Votre parole poétique a la fraicheur et la tremblante autorité de l’expérience (…) J’y ai retrouvé cette disponibilité au monde offert, cette douce ignorance, cette marche flexible qui va de l’avant. » Jean-Pierre Lemaire

« La sobriété fervente de ses mots touche au cœur (…), dénoue avec bonheur et patience ce quelque chose qui habite et incendie nos cœurs, et l’apaise ensuite d’une douceur obstinée. » Jean-Luc Maxence

« La méditation du poète n’est qu’abandon, désapropriation. (…) Bernard Perroy s’obstine à chanter « la part manquante / qui fait l’essentiel de notre beauté » (…) Alors que tout est fait pour oublier ce manque, les poètes n’ont de cesse de nous le rappeler, de « défaire / en nos cœurs l’idole vivace, / les fausses joies, certains bouquets / trop vite rassemblés. » Gérard Pfister

Complément :
- Bernard Perroy sur Wikipédia