Durant l'été 2009, j'ai eu le privilège de rencontrer Wernfried Koeffler. De nos échanges est né un livre Le poète et le diplomate - Les mots et les actes paru au mois d'avril de cette année. Christiane Golési a lu ce livre et nous a fait l'amitié de nous envoyer le texte qui suit afin de nous faire partager ses impressions de lecture.
Quand un ambassadeur rencontre un poète, que se racontent-ils ? Wernfried Koeffler, ancien ambassadeur d’Autriche et Jean-Luc Pouliquen, poète et critique littéraire, explorent en un dialogue complice leur commune patrie : le territoire des mots, et une même passion : l’action sociale.
Puisque tout langage échappe à celui qui l’émet, Wernfried Koeffler, qui exerça ses fonctions sur trois continents, illustre les raisons de l’extrême vigilance qu’il faut appliquer envers le monde et envers soi-même lorsque l’on évolue dans la sphère du pouvoir. Cela permet de mieux comprendre pourquoi Henry Beyle et Alexis Leger, entre autres diplomates, écriront sous les noms de plume de Stendhal et Saint-John Perse ; et pourquoi il sera recommandé à Romain Gary, en même temps qu’il reçoit l’autorisation de publier Le Grand Vestiaire, de prendre un pseudonyme. Il faut donc changer de masque, à défaut de le tomber, ou comme Jacques de Bourbon Busset, démissionner pour se consacrer à la seule création littéraire.
C’est assurément la figure de l’écrivain-diplomate qui fascine Jean-Luc Pouliquen, pour qui exercer la diplomatie culturelle signifie favoriser la connaissance, le partage et le respect des cultures du monde. Car c’est aussi et surtout l’implication de la culture dans le social, l’humanitaire et le politique qui donne son véritable sens à la fonction du poète. Pour J.L. Pouliquen, l’artiste existe s’il s’inscrit dans l’Histoire pour en témoigner ou la façonner. Lorsque, au niveau du pouvoir décisionnaire, le véritable enjeu tient dans la confrontation du créateur et du bureaucrate, l’écrivain-diplomate n’est-il pas l’homme « idéal », l’homme à l’intersection de la culture et du politique, qui passera du mot à l’acte ? Tel Claudel, ambassadeur au Japon, qui fondera l’institut franco-japonais.
Je laisse au lecteur le soin de découvrir comment W. Koeffler a exercé l’art contrôlé de la diplomatie ; comment, de concert avec des artistes aussi immenses que généreux il a favorisé quelque approche interculturelle insolite ou œuvré pour une grande cause ; comment, dans ses missions diplomatiques, il a adopté une stratégie de combat personnelle faite de risques calculés et de coups de cœur.
Cet ouvrage, érudit dans le fond, délié et élégant dans la forme, ne serait pas complet s’il y manquait la sphère privée, le rôle de l’épouse (faut-il qu’elle soit dévouée) et des enfants qu’on ne plaint pas mais qui ne sont pas forcément les mieux lotis dans leur univers cossu.
Adolfo Pérez Esquivel, alors artiste martyr de la dictature (qui recevra par la suite le Prix Nobel de la Paix) préface cet ouvrage en rappelant l’acte « silencieux et courageux » de W. Koeffler, qui facilitant le départ de Buenos Aires de ses trois jeunes enfants, leur a ainsi sauvé la vie.
C’est assurément la figure de l’écrivain-diplomate qui fascine Jean-Luc Pouliquen, pour qui exercer la diplomatie culturelle signifie favoriser la connaissance, le partage et le respect des cultures du monde. Car c’est aussi et surtout l’implication de la culture dans le social, l’humanitaire et le politique qui donne son véritable sens à la fonction du poète. Pour J.L. Pouliquen, l’artiste existe s’il s’inscrit dans l’Histoire pour en témoigner ou la façonner. Lorsque, au niveau du pouvoir décisionnaire, le véritable enjeu tient dans la confrontation du créateur et du bureaucrate, l’écrivain-diplomate n’est-il pas l’homme « idéal », l’homme à l’intersection de la culture et du politique, qui passera du mot à l’acte ? Tel Claudel, ambassadeur au Japon, qui fondera l’institut franco-japonais.
Je laisse au lecteur le soin de découvrir comment W. Koeffler a exercé l’art contrôlé de la diplomatie ; comment, de concert avec des artistes aussi immenses que généreux il a favorisé quelque approche interculturelle insolite ou œuvré pour une grande cause ; comment, dans ses missions diplomatiques, il a adopté une stratégie de combat personnelle faite de risques calculés et de coups de cœur.
Cet ouvrage, érudit dans le fond, délié et élégant dans la forme, ne serait pas complet s’il y manquait la sphère privée, le rôle de l’épouse (faut-il qu’elle soit dévouée) et des enfants qu’on ne plaint pas mais qui ne sont pas forcément les mieux lotis dans leur univers cossu.
Adolfo Pérez Esquivel, alors artiste martyr de la dictature (qui recevra par la suite le Prix Nobel de la Paix) préface cet ouvrage en rappelant l’acte « silencieux et courageux » de W. Koeffler, qui facilitant le départ de Buenos Aires de ses trois jeunes enfants, leur a ainsi sauvé la vie.
Christiane Golési
Commentaire trés intéressant reflétant une analyse approfondie du dialogue entre Wernfried Koeffler et Jean-Luc Pouliquen.
RépondreSupprimerCe livre est un bel exemple d'une amitié écrite qui questionnne son identité littéraire, à travers deux figures emblématiques oeuvrant pour la paix.
Laure Dino
Je crois que l'art de la diplomatie est une qualité essentielle du poète, qui parvient à diffuser des idées et des sentiments sans jamais chercher à salir, ni blesser quiconque. Il sait voir la part du beau en toute chose et parer le mauvais pour le rendre tolérable.
RépondreSupprimerEt je pense que, par-delà l'écriture, Jean-Luc est foncièrement, dans chaque bribe de son quotidien, un poète-diplomate.
Je partage l'avis d'Anne Marie, le poète ne cherche pas à salir, mais à dénicher le beau de chaque moment, dans chaque humain, en riant gentiment de nos défauts, mais sans se moquer.
RépondreSupprimerJ'ai eu grand plaisir à lire "Le P et le D", écrit sous une forme originale de dialogue au style souple, et d'une grande agilité d'esprit.
RépondreSupprimerOn découvre la vie et les contraintes du métier de diplomate, obligé de s'adapter à divers pays et formes de civilisations, ce qui lui permet d'élargir son
esprit et d'approfondir sa connaissance des hommes.Cet enrichissement contribue à faire naître chez certains d'entre eux, un vocation d'écrivains, qu'ils en tirent des sujets d'écriture ou cherchent au contraire une évasion à la vie très cadrée qu'ils mènent.
Dans ce dialogue le poète, Jean-Luc Pouliquen, en faisant parler le diplomate Wernfried Koeffler, nous fait plonger dans l'histoire tout court, puisque le diplomate par son métier, est partie prenante de l'histoire de son pays natal et de son pays hôte. La conversation porte sur de nombreux écrivains diplomates à différentes époques et de différentes nationalités.On découvre donc dans le livre des pans d'histoire récente, que l'on a vécue, ou plus ancienne, dont on a entendu parler, ce qui rend le livre très vivant et facile à lire.
Je ne saurais trop en recommander la lecture, si l'on veut passer un bon moment.
Merci pour ce livre de culture qui nous fait côtoyer de grands esprits. Après cette lecture on regrette un peu de ne pas avoir embrassé la carrière diplomatique, en oubliant les difficultés de recrutement et les contraintes ....diplomatiques ! Pour devenir un bon diplomate, ne faudrait-il pas d'abord avoir l'âme d'un poète pour découvrir la face cachée et véritable de la réalité ? La clairvoyance prophétique et historique de Chateaubriand et de Claudel en est une illustration.
RépondreSupprimerL’émission de France Musique sur la présentation du livre : Le diplomate et le poète, est riche en contenu aussi bien musical qu’évènementiel, elle reflète des rencontres déterminantes (Ravi Shankar…) révélatrices d’une culture universelle où l’Europe a toujours un rôle à jouer, un ferment d’espérance pour nous-mêmes.
RépondreSupprimerDans un monde bouleversé le poète a-t-il encore une fonction dans le dialogue des cultures?
La démarche obstinée de Jean-Luc Pouliquen pour valoriser la poésie dans ses qualités esthétiques et humanistes nous indique un chemin ascendant (cf. Th. De Chardin) toujours à défendre.
En cela il reprend le flambeau de G. Bachelard dont les œuvres témoignent de la richesse de l’imaginaire et de la poésie mystérieuse de la nature dans sa vie profonde (cf. « L’eau & les rêves »).
A ce propos nous rappelons les publications de Jean Luc Pouliquen (édition de l’Harmattan) sur le rôle éminent du philosophe dans la découverte de la poésie : Bachelard ou le rêve des origines.
Michèle Serre