Dans Souffles et Songes , publié aux éditions Sac à mots, l’encre tourmentée de Françoise Rohmer répond au poème de Colette Gibelin.
Echevelé,
bousculé, secoué,
tous les vents s’y sont mis,
l’arbre résiste
Il s’accroche,
ne veut pas de la dérive des racines,
du grand remuement des branches arrachées
Il veut sa place, ici,
dans la roche dure qui l’enserre,
parmi ses semblables,
buissons et brins d’herbe
Il veut sa place,
archet tendu vers le ciel,
rêveur d’inaccessible
L’arbre
vacille parfois
La quête est douloureuse,
les oiseaux et les fleurs s’échappent
Le doute gémit en lui,
sifflement désespéré
Tous les vents s’y sont mis
Lumière,
pourquoi m’as-tu abandonné ?
Résister, résister,
entrer en dissidence
L’obscur ne triomphera pas
*
Dans la belle collection raffia des éditions Alain Benoit, consacrée à des poèmes sur les jardins, Françoise Rohmer a réalisé plusieurs encres sur papier pour accompagner le recueil de Colette Gibelin : Comme un chant de fontaine. En voici trois exemples :
Jardin d’hiver
Arbres cassés, souffrant sans cri,
sans geste
La neige règne sur l’univers
Un grand silence s’est figé
sur le chaos des branches
On a cessé de s’émouvoir
Une blancheur voluptueuse et tragique
engloutit la beauté du désastre,
immobilise les désirs
Où sont enfuis les temps tumultueux
où la sève tourbillonnait,
virevolte des couleurs et des songes ?
Nuit lente
éblouie de silence
Le vent traîne sur nous un regard de poussière
Il effleure les pétunias,
parle d’averses à venir
On voudrait retrouver les sables
et le vertige des étoiles
la délivrance et le feu clairvoyant
Premiers crocus
illuminant le jardin
comme une bouteille à la mer
Il faut y croire encore une fois
Même si l’espoir
n’est qu’un grand soleil fou
que la nuit, la goulue,
happera comme une huître
(Poèmes de Colette Gibelin, encres de Françoise Rohmer)
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