Des hauteurs de la Provence s'envolent pensées et créations d'aujourd'hui

samedi 25 janvier 2014

Jours de poésie à Pau


Les initiatives pour donner toute sa place à la poésie dans la Cité contemporaine sont une des préoccupations de ce blog. Depuis plusieurs années, j'ai le plaisir de retrouver en été Michel Bernier pour le festival des Voix Vives de Sète où il anime des rendez-vous quotidiens. Mais son activité n'est pas seulement estivale. Michel est membre du Centre de recherches poétiques de Pau. A ce titre il a été amené à travailler et à publier sur des poètes comme Lorand Gaspar, Jacques Réda, Edouard Glissant ou encore Antoine Emaz. Récemment, avec quelques amis, il s'est lancé dans l’organisation de rencontres dont il m'a semblé intéressant de parler ici. Pour cela Michel a accepté de répondre à mes questions.

Bonjour Michel, te voici donc lancé dans une nouvelle aventure, différente à la fois des colloques de l'Université de Pau et du festival de poésie de Sète.


Michel Bernier
Oui, en effet. Il est certain que le travail au Centre de Recherche cité dans ta présentation m'a fait découvrir des poètes importants et m'a donné l'occasion de lire leurs œuvres avec une attention particulière. Cela m'a aidé aussi à y voir plus clair dans mon rapport à la poésie. Tu as raison de mentionner aussi le "concentré" de poésie(s) lié au Festival des Voix Vives, un moment de découvertes et de belles rencontres. Mais, avec quelques amis, j'ai partagé le désir de tenir un calendrier de lectures dans un lieu en plein cœur de notre ville, Pau. C'est ce que nous faisons depuis plus d'un an dans l'arrière-salle d'une très ancienne et belle brasserie connue de tous les Palois.

Hors des cadres donc de l'institution culturelle, tels que nous avons l'habitude de les fréquenter aujourd'hui, comme par exemple une médiathèque ou mieux une Maison de la Poésie.

Oui. Nous n'avons pas de Maison de la Poésie à Pau. Je ne suis pas, à titre personnel, opposé par principe à une lecture de poésie en Médiathèque mais pour ce qui est de notre petit groupe, un lieu dégagé de ce que l'institution appelle culture nous convient mieux. Ainsi, il n'est pas rare après la lecture, un verre à la main, de lier conversation avec des "curieux" et, évidemment, il est question de poésie. Tous ont ou ont eu une relation plus ou moins lointaine, plus ou moins heureuse avec la poésie. En tout cas il y a échange. Mais nos auditeurs fidèles sont, pour la plupart, des personnes qui s'intéressent à la poésie, celle qu'on appelle moderne ou contemporaine, ou à quelque autre forme d'art et qui ont eu l'occasion de nous rencontrer lors d'expériences antérieures. Remarquons tout de même que chaque nouvelle soirée s'enrichit de nouvelles têtes. Le bouche à oreille fonctionne. L'intérêt de cette formule, c'est la liberté totale quant au choix des poètes et au rythme de chaque lecture.

Comment s'organise chaque rencontre ?


Simplement. Les poètes ont été choisis collectivement à la fin de l'année précédente, l'un d'entre-nous prend la responsabilité d'une ou plusieurs rencontres : choix du poète, choix des poèmes, des pages qui, autant que faire se peut, mettent en lumière l'unité de l’œuvre... ou sa diversité. Les dates sont établies pour l'année : le 1er mardi du mois, nous l'avons appelé Le Jour Fixe. Nous commençons par une courte présentation du poète, de ce qui selon nous fait sa singularité. Sans être trop précis puisque nous nous limitons à un maximum de deux minutes... et que le mieux, c'est de le faire entendre. C'est alors le temps de la lecture, une quarantaine de  minutes. Le plus souvent, deux voix, forcément différentes, qui essaient, chacune dans sa tonalité, de servir au mieux la voix du poète. Sans autre forme de spectacle. Deux chaises, une table.
Suit le verre de Jurançon, moelleux ou sec, ou jus de fruit ou tisane, bref, nous sommes dans une brasserie. C'est évidemment le moment de l'échange avec ceux venus écouter. Et même, ceux qui le désirent s'attablent pour une garbure ou autre confit. Ainsi, le patron de l'établissement ne sera pas mécontent de nous revoir .

Christine de Camy, Michel Bernier et Bernadette Engel-Roux lors d'une lecture consacrée à Robert Marteau




Quels sont les poètes dont vous avez déjà lu les œuvres ? Quels seront les prochains ?

Pour l'année 2012/2013 : Jaccottet, Guillevic et Jandl (poète autrichien,1925-2000), Michaux, Gustave Roud, Follain, Andrée Chédid, Robert Marteau. Pour 2013/2014 : Pessoa, Pierre-Albert Jourdan, Valérie Rouzeau, Thierry Metz et à venir Rainer Kunze (poète allemand, ex.RDA), René Guy Cadou ou Jean Malrieu, Lorand Gaspar, Abdellatif Laâbi... et peut-être un autre à déterminer.

Avec tes amis, vous donnez ainsi corps à ce besoin de poésie qui est réel et que l'on peut mettre en évidence dès que l'on prend des initiatives comme la vôtre. Votre expérience montre qu'en fait ce n'est pas si compliqué à organiser et qu'il existe des formules souples et conviviales. Le plus important, j'imagine, au delà des dispositions matérielles, viendra de l'esprit qui préside à ces soirées. C'est de lui dont dépendra leur succès.

Oui, tu as raison, il faut préciser que si nous sommes heureux d'offrir à notre modeste auditoire la découverte ou une meilleure connaissance de tous ces poètes, c'est aussi un plaisir pour le lecteur ou la lectrice de prêter sa voix, avec son timbre particulier, à une parole poétique, une  voix aussi, mais qui d'abord se fait reconnaître dans le silence de la page. L'enjeu étant d'éviter la discordance. Mais ce à quoi nous tenons le plus, peut-être, c'est que ce soit un beau et simple moment de partage.
Je profite de l'opportunité pour remercier l'association d'artistes Ateliers d’Aujourd’hui qui nous parraine.

Merci Jean-Luc pour le plaisir pris à notre conversation.

Merci à toi Michel, et bonne année en poésie à Pau !

Compléments :
 - Les photographies sont de Jacqueline Alos que nous remercions de sa contribution.
- Le Jour Fixe a lieu tous les premiers mardis de chaque mois à la Brasserie Royale à Pau.

1 commentaire: